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Reproduction en captivité

Café

En janvier 2015, j'étais au Panama. Ce qui avait commencé comme un voyage d'agrément prit rapidement des allures d'adoption internationale à la suite de la visite d'une plantation de café.
C'est alors que je découvris avec horreur le sort qu'on réservait aux grains de café. Arrachés à leur arbre par des mains autochtones, les cerises étaient déshabillés par des machines bruyantes. Les grains nus étaient ensuite abandonnés en plein soleil avant d'être brûlés dans des fours pendant de longues minutes. À la suite de ce traitement inhumain, certains d'entre eux, plus malchanceux, étaient immédiatement broyés et ébouillantés pour satisfaire l'envie de touristes amateurs de plaisirs gustatifs.
Évidemment, un amoureux des plantes comme moi, ne pouvait rester indifférent à ce spectacle et je décidais alors de faire ma part. Je ramassais une cerise tombée de l'arbre et la cachais dans une poche de mon sac à dos. Mieux valait une vie de plante d'intérieur au Canada qu'une fin dans une cafetière panaméenne.
De retour au pays. l'adaptation ne fut pas facile et il fallut bien attendre 3 mois avant que les deux graines (une cerise, deux graines) ne se décident à montrer le bout de leurs cotylédons. Deux ans après, les deux plants fleurissaient. Ce fut une heureuse surprise car je pensais que l'enfance du caféier durait plus longtemps. C'est quand même un arbre et chacun sait que la maturité sexuelle de certaines essences peut être tardive.
Aujourd'hui, 8 mois après sa floraison, je suis récompensé et tout le monde à la maison attend l'heureux événement, car l'unique fruit d'une fécondation artificielle à l'aide d'un pinceau commence à rougir. Personne n'y croyait vraiment.

Café

Zoogamie et zoochorie...

...sont deux façons ingénieuses qu'ont inventé les plantes pour voir du pays.
Dans le cas de la zoogamie, il s'agit de se faire transporter sous forme de pollen par des animaux dans le but d'aller féconder un ovule lointain; une espèce de correspondance amoureuse qui finit par porter ses fruits. Le rôle de Cupidon est souvent joué par un insecte (entomogamie), mais il arrive que soit un oiseau (ornithogamie), par exemple un colibri, ou encore un mammifère comme une chauve-souris ou un jardinier.

Cirsium horridulum

Dans le cas de la zoochorie, la plante confie sa progéniture (sous forme de graine) à un animal et espère que ce dernier saura lui trouver une terre accueillante. C'est l'équivalent de la cigogne, à cette différence près que l'organisation multinationale des plantes a étendu le procédé à l'ensemble du règne animal.
Pour le voyageur, il y a plusieurs options. La graine qui veut profiter du paysage pendant le voyage choisit l'épizoochorie en s'accrochant à l'animal de passage. Les exemples sont nombreux, mais celui qui nous touche le plus est probablement celui de la bardane

Arctium lappa
Une adepte de l'épizoochorie: la grande Bardane
Arctium lappa

D'autres graines, moins regardantes sur les conditions de voyage, préfèrent l'endozoochorie. Elles revêtent alors une tenue de voyage alléchantes et attendent d'être happées par le transporteur. Une fois digérées, elles seront déposées plus loin; inutile de faire un dessin.

Turdus migratorius

Il y a aussi l'option de la dyszoochorie, qui consiste à faire partie du régime alimentaire d'un animal tout en espérant échapper à sa voracité. C'est le jeu dangereux que pratique entre autres, le gland avec l'écureuil. Emporté et caché par l'animal, il espère se faire oublier et germer dès que les conditions climatiques le permettront. Cela doit marcher puisqu'il y a encore des chênes.

Cerises de Virginie

Prunus virginiana

Acidulées et extrêmement astringentes, j'espérais qu'avec le sucre elle ferait un aussi bon clafoutis que les griottes d'Europe. Malheureusement, la quantité de chair par rapport au noyau a rendu la dégustation, laborieuse. Il vaut mieux les préparer en confiture. Avis aux amateurs: faites attention, car toutes les grappes de fruits rouges ne sont pas des cerises.

Cueilleur
Prunus virginiana

Ce qu'il en reste

Ex-liberté

Ce qu'il reste de l'Île des Soeurs à Montréal tient en un bois retenu prisonnier entre les clôtures de fer forgé de résidents aussi fortunés qu'éphémères et un golf qui ne sera jamais écologique (quoiqu'ils en disent). Il y a longtemps, je me souviens d'avoir apporté mon soutien naturaliste au comité de protection du boisé, plus soucieux de préserver l'intimité de leur piscine creusée que d'empêcher la destruction des champs de choux puants ou de protéger les vignes sauvages qui abritaient tant de petites nyctales.

Ex-prairie
Ex-vignes sauvages abritant d'ex-nyctales
Ex-arbres
Aujourd'hui, les vignes ont été remplacées par des rangées de maisons et le sous-bois a été transformé en piste de jogging. Les symplocarpes fétides sont toujours là.
Ce qu'il en reste en cette saison sont ces étranges fruits trop pesants (celui de la photo fait environ 70 grammes) pour être emportés par le vent et pas assez appétissants pour être ramassés par les passants. Ils ressemblent à de mini-ananas et, effectivement, on n'en est pas très loin malgré les distances géographiques et taxonomiques : l'ananas (Ananas comosus) est une broméliacée qui pousse dans les endroits ensoleillés et secs d'Amérique du Sud alors que le chou puant (Symplocarpus foetidus) est une aracée qui pousse dans les sous-bois humides du nord-est de l'Amérique et de l'Asie. Bien que les fruits se ressemblent, les botanistes y voient des différences. La ressemblance réside dans le fait qu'il s'agit de fruits étroitement juxtaposés qui ont fusionné en grossissant; la nuance étant dans la partie du fruit qui fusionne. Je vous laisse creuser la question si elle vous intéresse.

Futur chou puant
En l'ouvrant, il s'en dégage une odeur forte et surprenante d'ail. La chair blanche est plutôt sèche; sa texture ressemble à la mousse dont on rembourre les fauteuils. Sur le pourtour, on voit les graines. Celles qui ont été épargnées par la dissection seront plantées dans le boisé du Tremblay, un habitat propice à cette espèce et qui l'a peut-être déjà abritée, il y a très longtemps...avant l'agriculture et la repousse. On verra bien.
     
 


Chez Manon et Sylvain


Toutes les cartes situent le royaume des bleuets quelque part à 5 heures de voiture au nord de Montréal, autour d'un grand lac qui ressemble plus à une mer intérieure.
Oui, peut-être. En tout cas moi je peux vous dire que le paradis du bleuet, lui, n'est qu'à 40 minutes de la métropole dans la direction opposée, à Saint-Jacques-le-Mineur, au 623 du boulevard Édouard VII exactement.
Le seul problème avec les bleuets de Manon et Sylvain, c'est qu'ils bousculent les standards et que vous ne voudrez plus acheter ceux des épiceries. Oubliés les petits bleuets de la Côte-Nord, enterrés les gros américains fades, la nouvelle norme est le gros bleuet ferme et gouteux de Saint-Jacques-le-Mineur. Et pas de danger de s'empoisonner, c'est de l'agriculture scrupuleusement bio. 

Menthe des champs
Verveine hastée
Typha à feuilles étroites

L'amertume du café

Difficile de passer à côté de Boquete (prononcez bokété) ! Tous les guides touristiques vous y conduisent, vantant les charmes de cette petite ville réputée internationalement pour ses plantations de café. Nichée dans le fond d'une vallée à 1600 m d'altitude, on y côtoie, dans un curieux mélange de populations, des touristes promenant Ulysse le Routard, leur meilleur ami sur cette Lonely Planet, des riches retraités états-uniens en quête de confort, de sécurité et d'avantages fiscaux, des bobos panaméens qui le temps d'un congé savourent le plaisir de dominer la chaîne alimentaire avant de retourner dans la jungle incertaine de Panama Ciudad et de ses affaires, et les indiens Ngobe qui profitent de cette manne pour troquer leur production artisanale contre des produits de première nécessité, en l’occurrence des sacs de maïs et du tissu.  S'il reste de l'argent, ils se feront plaisir avec de l'accessoire, mais jamais du superflu.


Tout ce petit monde se côtoie dans une indifférence feinte parfois écorchée par l'appareil photo d'un touriste et dans une paix surprenante compte-tenu de la disparité manifeste des ressources de chacun. Il faut croire que tout le monde y trouve son compte puisqu'on ne peut pas accuser la police d'être outrageusement présente.
Les hauteurs de Boquete sont occupées par les plantations de café. On y arrive par des routes de montagnes étroites et après avoir traversé les baraquements des travailleurs saisonniers. Ici, le confort ne se traduit pas en étoiles ou alors ce sont celles que l'on voit à travers les trouées des toits de tôle. Baraquements saisonniers ou permanents, difficile à dire quand on est touriste et qu'on ne fait que passer. Ce qui est sûr, c'est qu'ils abritent des familles entières.

À l'extérieur des murs
Dans les murs

La plantation est au bout de la route. On y est accueilli par une guérite et une barrière, mais les gros 4X4, même s'ils sont de location, sont toujours les bienvenus. La barrière se lève avant même d'avoir esquisser un signe de la main et nous nous retrouvons dans le confort chic et cher de la propriété. Nous sommes en janvier et la récolte du café bat son plein. Tout ce fait à la main, en prélevant seulement le fruit à bonne maturité; un travail d'indien, même pas de moine.



Le grain sera ensuite séparé de la pulpe du fruit (une drupe) par séchage ou par lavage, puis décortiqué - la fine membrane qui recouvre la graine est retirée mécaniquement - et torréfié.



Le caféier est un arbuste à feuilles persistantes dont deux espèces sont cultivées: Coffea arabica qui produit le café arabica et Coffea canephora qui donne le robusta. L'arabica, plus fin et plus aromatique est aussi moins chargé en caféine. Un peu plus exigeant quant à ses conditions de culture, il préfère la fraîcheur des flancs montagneux des régions tropicales. En Amérique, il n'est pas indigène; il viendrait plutôt d'Éthiopie et il n'a été planté là que pour notre plaisir de boire son infusion. Or, ce qui fait notre bonheur ne fait généralement pas celui de l'autre, la nature, car nous ne savons pas nous fixer de limites. Ici, c'est évident. Les rangs de caféiers ont complètement  supplanté la forêt originelle. Seul témoignage du massacre, d'énormes souches qui refusent de se putréfier et quelques prisonniers que l'on tolère pour leur ombre.
 
 
     

La rouge et la noire

L'airelle vigne-d'Ida et la camarine noire sont deux spécialités comestibles de Borée. Pourtant, vu leur taille (4 à 8 mm de diamètre), elles ont plus de risques d'être piétinées que d'être mangées.

Vaccinium vitis-idaea
Empetrum nigrum

Nature morte ?

Pantoute ! Simplement en attente. 
Maintenant, il faut les semer, les oublier et se laisser surprendre au printemps.
Ah, j'oubliais. Essayer de ne pas en vouloir aux écureuils.   


Magicienne et grande voyageuse

Le nom de la Circée de Lutèce est un poème en soi et, si sa floraison est assez insignifiante, ses fruits en revanche sont équipés pour voyager loin. Pas étonnant donc de retrouver en Amérique cette plante d'Eurasie.
Évidemment, elle a été utilisée pour soigner, notamment les rhumatismes et la fièvre.  Mais quelle plante ne l'a pas été ?

Concombre grimpant, Echinocystis lobata, Wild Cucumber

En cherchant un oiseau à travers les branches, il arrive que l'on trouve un concombre. Celui-ci est épineux et on le dit sauvage, mais il est de la même famille que le "cultivé" (les cucurbitacées). On peut le rencontrer n'importe où en Amérique du Nord - il y est indigène - à condition que le sol soit humide, qu'il entretienne l'espoir de trouver de la lumière en grimpant et bien sûr qu'il trouve un support. Il est aussi très utilisé comme plante ornementale, notamment pour couvrir les charmilles.
Il faut bien avouer que sa floraison est spectaculaire. D'ailleurs, avec autant de fleurs, on se demande pourquoi il n'y a pas plus de fruits. La raison est qu'il n'y a qu'une fleur femelle à la base de chaque grappe de fleurs mâles.


Aubépine monogyne, Crataegus monogyna, Common Hawthorn


Il parait qu'on la trouve au Québec, mais je ne l'y ai jamais vue. Celle-là vient de Touraine où elle abonde. L'aubépine est un arbuste qui pousse rapidement dans les premières années, puis qui s'économise pour vivre plusieurs centaines d'années; certains disent même plus de 1000 ans. Généreuse, elle contribue aussi à nous prolonger car l'extrait de ses fleurs permet de traiter l'arythmie et l'insuffisance cardiaque légère à modérée; une propriété connue depuis longtemps des herboristes et confirmée depuis peu par la science.
Ce ne sont pas ses seules vertus. Dans "le livre des arbres, arbustes et arbrisseaux" de l'ethnobotaniste Pierre Lieutaghi, on peut lire que c'est l'arbre bienfaisant des campagnes, associé au culte de la Vierge. On s'y abrite le temps d'un orage, car il n'est jamais frappé par la foudre. On peut même porter un rameau pour se promener sans risque d'être foudroyé. Encore plus magique, les branches plantées sur les tas de fumiers ou clouées à la porte d'une étable empêchent la prolifération des serpents et des crapauds. Enfin, à essayer chez vous: un rameau cueilli à minuit le jour de Noël fleurira à la chandeleur.  

Le temps de la faîne

Difficile de trouver un accès pour se promener sur le Mont Rougemont, particulièrement pendant le temps des pommes. Ses abords sont encerclés par les vergers et rien ne ressemble plus à des voleurs de pommes qu'un couple de naturalistes. Mais si vous le demandez gentiment, un résident vous dévoilera peut-être le secret de son accès; c'est ce que nous avons fait.

Hêtre à grandes feuilles
Ensuite, si vous ne vous faites pas renverser par un des nombreux vélos de montagne qui saccagent le sous-bois, si vous ne vous faites pas tasser sur le bord du chemin par un cavalier ou harceler par le chien d'un promeneur, vous aurez le plaisir de prendre votre dose de  micro-ondes au pied des émetteurs installés sur le sommet tout en admirant la vue sur la vallée du Saint-Laurent et sur les montagnes plus à l'est. 
Faînes
Il y a sûrement des choses intéressantes à découvrir à l'écart du chemin, mais je suis plus discipliné qu'un vélo de montagne et j'ai respecté, cette fois au moins, les panneaux d'interdiction d'entrée qui m'incitaient à rester dans le droit chemin; origine étrangère et charte des valeurs québécoises oblige.  


Mais, pour revenir au titre du message, nous avons quand même eu le plaisir de contempler des impatientes pâles (ça faisait longtemps) et de ramasser des noix de caryer cordiforme ainsi que des faînes, ces espèces de petites châtaignes produites par les hêtres. Elles se mangent décortiquées et grillées; vous n'aurez qu'à lire la prochaine encyclopédie des fruits publiée par Québec Amérique à laquelle je ne suis pas complètement étranger pour en savoir un peu plus. Elles sont aussi comestibles crues, mais il ne faut pas en abuser. L'enveloppe de l'amande contient en effet de la fagine et il parait qu'à fortes doses, elle a des effets secondaires désagréables. On ne parle quand même pas de grande toxicité. 

Brou et noix