Un an dans la vie d'une forêt

Publié en 2012 sous le titre original de The Forest Unseen: A Year's Watch In Nature, "un an dans la vie d'une forêt" est le carnet naturaliste de David G. Haskell, un biologiste américain d'origine britannique. Il y consigne ses observations du mètre carré de forêt primaire appalachienne qu'il a choisi de suivre pendant toute une année; chaque chapitre correspondant à une visite, à un événement particulier et aux réflexions qu'il lui inspire.
De lecture facile, on apprend évidemment plein de choses sur la vie qui anime cette forêt du Tennessee comme celles d'une bonne partie de l'est de l'Amérique du Nord. Mais au-delà de l'interprétation biologique des phénomènes, c'est cette préoccupation qu'à l'auteur de les placer dans un contexte plus global qui rend le livre passionnant et plus universel.
À titre d'exemple, la découverte d'une viorne broutée par un cerf sert de prétexte à Haskell pour nous expliquer l'extraordinaire capacité des ruminants à tirer leur énergie d'aliments que les autres mammifères sont incapables de digérer. Elle lui donne également l'occasion de battre en brèche quelques idées reçues sur la surpopulation du cerf de Virginie et sur ses méfaits sur l'environnement tant décriés par certains groupes, qu'ils soient d'écologistes ou de chasseurs. Cette surpopulation ne serait que relative puisque les effectifs contemporains sont toujours comparés à ceux de l'après-colonisation de l'Amérique du Nord, alors que le cerf avait bien failli disparaître sous les coups de fusil des chasseurs. Si on se fie aux récits des premiers colons, tout indique au contraire que l'espèce était beaucoup plus abondante à cette époque qu'aujourd'hui et que les forêts d'autrefois avaient un aspect bien différent et certainement plus clairsemé par le broutage  que celui que nous leur connaissons.


Mets tes raquettes, on sort.

-19°C au thermomètre, -35° ressenti avec le vent et 25 cm de neige dans quelques heures, c'est la première tempête de l'hiver. Cela n'arrête pas les oiseaux qui doivent continuer à s'alimenter pour compenser la perte de chaleur.  

Jardin de simples

Les jardins de simples étaient au Moyen-Âge ce que sont les pharmacies aujourd'hui. Les plantes médicinales (simplicis herbae), principaux remèdes de l'époque, y ont été cultivées jusqu'à ce que la révolution industrielle et les progrès scientifiques permettent d'identifier, d'isoler et de synthétiser leurs principes actifs. Les chamans, guérisseurs, herboristes, apothicaires ou médecins se sont alors transformés en pharmacologues et pharmaciens. Pas tous cependant, car certains s'efforcent de perpétuer un savoir-soigner traditionnel .
Si la formation et le diplôme d'herboriste n'avaient pas été supprimés en 1941 par le gouvernement collaborationniste de Vichy, peut-être aurais-je été l'un deux. À la place, je suis devenu pharmacologue. Cela n'a pas entamé mon attachement pour ces plantes qui sont à l'origine de beaucoup de nos médicaments modernes et qui continuent aujourd'hui encore à alimenter notre pharmacopée. J'ai même, depuis trois ans, entrepris de collectionner les plantes médicinales dans mon jardin, une sorte de retour aux sources. Elles y sont rassemblées par famille, 3 à 4 individus par espèce et doivent répondre aux conditions suivantes: les vivaces doivent survivre à l'hiver québécois sans autre protection que le couvert neigeux et les annuelles doivent se resemer d'elles-mêmes. 


Tige quadrangulaire de la bugle rampante
Comme il fallait commencer quelque part, le choix de la première année s'est porté sur les lamiacées, une grande famille d'environ 6000 espèces qui a fourni quelques célébrités aromatiques et médicinales comme la menthe, la lavande, le thym, l'origan, le basilic et la sauge.
Faciles à identifier, les plantes de la famille ont en commun: une tige quadrangulaire, des feuilles simples, opposées (paire de feuilles se faisant face sur la tige) et décussées (chaque paire de feuilles fait un angle de 90° avec la précédente), des fleurs généralement bilabiées (une lèvre supérieure et une inférieure) à pétales soudés et un calice à 5 sépales soudés en forme de tube.
Jusqu'à présent, une vingtaine d'espèces sont acclimatées au jardin (marquées d'un astérisque dans la liste plus bas); il en reste une dizaine à trouver et à essayer de faire pousser.

Fleur de bugle rampante à lèvre supérieure presque inexistante
Fleur de monarde écarlate nettement bilabiée
Feuilles opposées et décussées de la menthe poivrée


























Des lamiacées médicinales

Agripaume cardiaque – Leonurus cardiaca *
Ballote fétide – Ballota nigra
Basilic – Ocimum basilicum
Basilic de Ceylan – Ocimum gratissimum
Basilic sacré – Ocimum tenuiflorum
Brunelle commune – Prunella vulgaris *
Bugle ivette – Ajuga iva
Bugle rampante – Ajuga reptans *
Bétoine – Stachys officinalis *
Calament – Clinopodium nepeta
Cataire – Nepeta cataria *
Collinsonie du Canada – Collinsonia canadensis
Coléus – Coleus forskohlii
Dictamne de Crète – Origanum dictamnus
Épiaire des bois – Stachys sylvatica
Épiaire des marais – Stachys palustris
Galéopside à tige carrée – Galeopsis tetrahit *
Galéopside douteux – Galeopsis segetum
Gattilier – Vitex agnus-castus
Germandrée des bois – Teucrium scorodonia
Germandrée maritime – Teucrium marum
Germandrée petit-chêne – Teucrium chamaedrys *
Hysope – Hyssopus officinalis *
Lamier blanc – Lamium album
Lavande aspic – Lavandula latifolia
Lavande stœchade – Lavandula stoechas
Lavande vraie – Lavandula angustifolia *
Lavandin – Lavandula x intermedia
Lierre terrestre – Glechoma hederacea *
Lycope – Lycopus europaeus
Marjolaine – Origanum majorana
Marrube blanc – Marrubium vulgare *
Menthe poivrée – Mentha x piperita *
Menthe pouliot – Mentha pulegium
Menthe verte – Mentha spicata
Monarde pourpre – Monarda didyma *
Monarde fistuleuse – Monarda fistulosa
Mélisse – Melissa officinalis *
Mélitte – Melittis melissophyllum
Origan d’Espagne – Coridothymus capitatus
Origan d'Héralée – Origanum heracleoticum
Origan vulgaire – Origanum vulgare *
Origan à inflorescences compactes – Origanum compactum
Orthosiphon – Orthosiphon stamineus
Patchouly – Pogostemon cablin
Pérille faux-basilic – Perilla frutescens
Romarin – Rosmarinus officinalis
Sarriette des montagnes – Satureja montana *
Sarriette des jardins – Satureja hortensis
Sarriette vulgaire - Clinopodium vulgare
Sauge d’Espagne – Salvia lavandulifolia
Sauge officinale – Salvia officinalis *
Sauge sclarée – Salvia sclarea
Scutellaire latériflore – Scutellaria lateriflora *
Scutellaire toque – Scutellaria galericulata
Scutellaire du Baïkal – Scutellaria baicalensis *
Serpolet – Thymus serpyllum *
Thym citron – Thymus x citriodorus
Thym saturéoïde – Thymus satureioides
Thym vulgaire – Thymus vulgaris *

Un 14 janvier à Longueuil (Québec)

Pas de fumée sans feu. Et quand l'écureuil gris fume, c'est qu'il fait froid. Il ne ressent peut-être pas les -20°C de ce matin de la même façon que moi, mais les effets du froid sur notre physiologie sont identiques et sa résistance me laisse admiratif.


Un 13 janvier à Longueuil

8:00, - 15°C, ciel nuageux, je regarde par la fenêtre. Ils sont tous là, regroupés dans le pommetier voisin, à attendre un soleil qui ne viendra pas. Des habitués, il ne manque que le pic, la tourterelle, la sittelle et le moineau. Peut-être sont-ils en train de manger les graines que nous leur avons laissées sous la terrasse. Pour m'en assurer, je descend au sous-sol pour jeter un œil par la fenêtre qui donne sous le patio; j'y trouve le reste de la gang des bruants et le pic mineur qui gosse une vieille souche récupérée pour servir de nichoir aux abeilles charpentières. Apparemment, elle sert aussi de supplément protéinique pour le pic qui a vite compris l'usage qu'en faisaient les abeilles. Pas d'inquiétude à avoir, il laisse toujours assez de larves pour une prochaine génération.

Cardinal rouge (femelle)
Cardinal rouge (mâle)
Bruant hudsonien
Roselin familier (mâle)
Junco ardoisé
Pic mineur (femelle)

Un 12 janvier à Longueuil

Journée ensoleillée, mais froide. Si les roselins familiers ne semblent pas apprécier les -15°C, les bruants hudsoniens sont, quant à eux, dans leur élément.

Yggdrasil et l'agrile

Immuable, Yggdrasil est le témoin de la destruction et de la renaissance des univers, le refuge des créatures vivantes qui repeuplent la Terre après chaque cataclysme. Si rien ne peut détruire le frêne de la mythologie scandinave, on ne peut malheureusement pas en dire autant de ses rejetons, décimés par l'agrile.
Cet hiver, au parc Michel Chartrand (Longueuil, Québec), l'ampleur de l'hécatombe saute aux yeux. Où qu'il se pose, le regard ne peut échapper au spectacle des arbres malades ou morts, écorcés par les pics qui se nourrissent du ravageur et de ses larves. Il faut préciser ici que, contrairement à ce que pensent certains, les pics ne sont pas nuisibles. Ne s'attaquant qu'aux arbres déjà malades et potentiellement condamnés, ils sont une conséquence, pas une cause.  
Heureusement, au parc, on ne coupe pas; c'est exprès et c'est tant mieux. On a compris que l'arbre, même mort, est utile. Source de nourriture, abri, il est bénéfique pour les survivants et leurs alliés: pics, sittelles, grimpereau et autres insectivores.  

Au parc Michel Chartrand, les choses suivent leur cours naturel 
Ailleurs, on coupe en expert, persuadé de maîtriser la situation.

Un 3 janvier au pied du Mont Orford


L'hibernation est réservée aux petits animaux. Pour les autres, il y a l'hivernation qui oblige ceux ayant le moins de réserves comme le raton laveur et le porc-épic à sortir de leur tanière de temps en temps pour se ravitailler. Et puis, il y en a pour qui l'hiver est une saison comme les autres. C'est par exemple le cas du vison d'Amérique, mais aussi du "fatbiker" dont le cri territorial résonne à travers bois: "Attention, Excusez, Merci".

Cerf de Virginie
Gélinotte huppée
Porc-épic d'Amérique


L'Arctique à 35 minutes de Montréal

Gamin, j'étais un grand visiteur de zoos. Aujourd'hui, je n'en suis plus un fanatique, loin s'en faut, bien que je reconnaisse leur vertu éducative pour des enfants dont ce sera peut-être le seul contact avec la "faune sauvage".
Même si je ne les fréquente plus trop, il y en a quand même un que j'essaie de visiter au moins une fois par an; c'est l'écomuséum de Sainte-Anne-de-Bellevue, dans l'ouest de l'île de Montréal. Une des principales raisons de cet intérêt particulier est que ses pensionnaires sont tous indigènes. L'autre est qu'il s'agit dans la plupart des cas de convalescents ou d'handicapés qui ne survivraient pas dans leur milieu naturel.
À l'écomuséum, les animaux vivent à leur rythme dans un paysage qui leur est familier. L'endroit est ouvert été comme hiver et on peut y observer de nombreux spécimens de la faune locale: amphibiens, reptiles, oiseaux et mammifères. En ce moment, ne vous attendez pas à trouver l'ours noir, mais il y en a beaucoup d'autres à découvrir.

Renard arctique dans sa livrée blanche
Une seule espèce (Alopex lagopus) mais deux formes de pelage
Renard arctique dans sa livrée bleue


Renard roux (Vulpes vulpes)
Loup gris (Canis lupus)
Loup-cervier ou Lynx du Canada (Felis lynx)



Fuligule à tête rouge (Aythya americana)
Canard pilet (Anas acuta)
Petit Garrot (Bucephala albeola)
Harle couronné (Lophodytes cucullatus)