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Eurosta la frileuse

En vous promenant cet automne, vous avez sûrement remarqué ces boules de la grosseur d'une noix qui ornent la partie supérieure des tiges de Verge d'or fanées. Il n'y en a généralement qu'une par tige, mais rares sont celles qui n'en portent pas.
La nature faisant de belles choses mais rarement inutiles, il ne s'agit évidemment pas de décorations de Noël. Des fruits ? Non plus. Ce sont plutôt des abris pour passer l'hiver; des abris fabriqués par la larve d'une petite mouche baptisée Eurosta solidaginis.

Eurosta solidaginis

La mouche ne dépasse pas 5 mm de long. Elle ne vole pas très bien et préfère la marche; ce qui ne l'a pas empêchée de coloniser presque toute l'Amérique du Nord. Vers la fin du printemps ou le début de l'été, après une quinzaine de jours d'existence débridée, elle dépose ses œufs sur une tige de Verge d'or. Oh, pas n'importe laquelle ! Solidago altissima et S. gigantea ont sa préférence. Une dizaine de jours plus tard, les œufs éclosent et les larves commencent à se forer un accès vers le cœur de la tige. Leur salive contient une substance semblable aux hormones de croissance de la plante, qui stimule localement la prolifération des cellules de la tige. La gale ainsi formée sert d'abri et de nourriture à la larve jusqu'à son émergence, le printemps suivant. 

Eurosta solidaginis

Évidemment, l'épaisseur des parois ne suffit pas à l'isoler du froid. Pour ce faire, en automne, quand les températures fraichissent, la larve commence à synthétiser du glycérol, un antigel qui empêche les cellules d'éclater en maintenant leur contenu à l'état liquide. Puis, Elle fait une dernière chose avant de s'endormir; elle se creuse un tunnel vers la sortie en prenant bien soin de laisser l'épiderme de la tige pour clore l'accès.     
Enfin tout ça, c'est dans le meilleur des cas, car en y regardant de plus près, on constate rapidement que la plupart des gales sont perforées. Et si vous êtes aussi observateurs que curieux, vous aurez sûrement remarqué que les stations de verges d'or sont très fréquentées par les mésanges à tête noire et les pics mineurs . Je vous laisse tirer vos propres conclusions.   

Eurosta solidaginis


La curiosité avec un C comme dans moteur


C'est toujours la même histoire. On trouve ça beau ou étrange (les deux se confondent souvent), on prend une photo et après, on veut savoir ce que c'est. 
À première vue, ça ressemble à une mouche. Le choix se trouve donc limité à un peu plus de 100000 espèces.
Au milieu du "Guide des insectes du Québec et de l'Amérique du Nord", il y a quelques planches en couleur, très pratiques pour les paresseux. Avec un peu de chance...
Bingo ! Gagné ! Yes ! Selon son origine dans la francophonie.
Dans la planche 14 intitulée "Mouches muscoïdes, Diptères, Division Schizophores", l'illustration des sarcophages, aussi appelées mouches à viande ou mouches à damier, ressemble beaucoup à la photo. La description dit: "Cuillerons importants; semblables aux calliphores, mais corps mat; hab. 4 soies notopleurales." D'accord, mais qu'est-ce qu'un cuilleron, à quoi ressemblent les callophores et où se trouvent les soies notopleurales ?      
La réponse à la deuxième question est plutôt facile. Dire que les mouches sarcophages ressemblent aux mouches callophores, c'est comme dire que les callophores ressemblent aux sarcophages. C'est réglé.
Les cuillerons maintenant. Dans l'internet, on lit que le cuilleron est un organe latéral du thorax en forme d'écaille situé sous le bord postérieur de l'aile et qui recouvre le balancier chez certains diptères (les mouches en font partie). On a même une image ici. Sur la mouche de la photo juste en-dessous, les cuillerons semblent effectivement assez développés.


En ce qui concerne les soies, le choix ne manque pas sur cette mouche. Reste à trouver les "notopleurales".
Comme le notum est le nom donné à la partie dorsale des 3 segments du thorax et que le pleure est celui donné à leur partie latérale, les soies notopleurales doivent être quelque part entre le dos et le flanc. Heureusement, deux schémas trouvés dans l'internet et dans le guide entretiennent l'espoir de s'y retrouver. Ceux qui s'intéressent à chétotaxie (nomenclature des soies) des diptères peuvent aussi consulter ce site.

Tiré du Guide des insectes du Québec et de l'Amérique du Nord,
Les guides Peterson, Broquet

Photo de Halvard : from Norway. (A drawing by Halvard from Norway.) [GFDL, CC-BY-SA-3.0 or CC-BY-2.5], via Wikimedia Commons

Et là, c'est l'incertitude, l'impasse, et forcément la déception. La photo ne permet malheureusement pas de compter les soies: deux certainement, quatre peut-être.
Alors, calliphore ou sarcophage ? Disons que les rayures longitudinales grises du thorax et les couleurs mates plutôt que métalliques suggèrent une sarcophage; ce qui réduit l'inconnue à un peu plus de 500 espèces. Évidemment, toutes ne vivent pas au Québec, loin s'en faut.