Un 26 juillet dans les Tablelands (Terre-Neuve)


Le parc national du Gros-Morne sur la côte ouest de Terre-Neuve est un lieu que nous ne pouvions pas éviter puisque c'est l'un des rares endroits où l'on peut se promener sur des roches issues du manteau terrestre. Le lieu est suffisamment unique pour avoir été classé dans le patrimoine mondial de l'humanité par l'Unesco, raison de plus pour ne pas l'ignorer.
Tels de gigantesques copeaux, des fragments du manteau ont été arrachées à plus de 5 kilomètres de profondeur par la collision entre les continents Laurentia et Gondwana, puis ramenés à la surface, il y a 500 millions d'années. Ils forment aujourd'hui des plateaux spectaculaires qui tranchent dans le reste du paysage par leur couleur orangée et leur quasi-absence de végétation.

Même altitude, ou presque, à gauche et à droite du sentier de randonnée. Et pourtant, un paysage bien différent.

Si ces montagnes à l'allure martienne ont l'air aussi désertique, ce n'est pas à cause de l'altitude ou de l'exposition au soleil. L'unique raison de cette discordance est chimique. Dans les tablelands, le sol est de la péridotite, la roche ultrabasique de couleur vert foncé, presque noire qui compose le manteau. Au contact de l'eau, elle se transforme lentement en serpentinite, riche en fer (lequel s'oxyde pour donner cette teinte ocre si particulière) et en métaux lourds tels que le nickel et le magnésium.

Sous l'effet de la serpentinisation, la péridotite, noire, se transforme en serpentine, verte. Dans les microfissures, le calcium précipite...
...et donne parfois des plaques de travertin.

Si ces conditions semblent peu propices à la vie, il n'est pas pourtant impossible qu'elle lui ait donnée naissance dans le fond des océans, à une époque lointaine. En tout cas, de la vie, il y en a sous la forme de quelques plantes particulièrement adaptées à ces conditions extrêmes. Les découvrir (et en parler dans un prochain billet) était même l'un des buts de la ballade.

Un 26 juillet sur le Western Brook Pond (Terre-Neuve)

Le Western Brook Pond fait partie d'une série de grands lacs alignés perpendiculairement à la côte ouest de Terre-Neuve. Si aujourd'hui, il correspond bien à la définition d'un lac ou d'un étang puisqu'il est coupé de la mer (le golfe du Saint-Laurent en l'occurence), le terme semble péjoratif pour désigner cette étendue d'eau longue d'une quinzaine de kilomètres, profonde de 150 mètres et bordée par des falaises de 600 mètres de hauteur.

Il s'en faut de peu - peut-être un léger réchauffement climatique comme nous savons si bien les faire - pour qu'il retrouve le statut de fjord qu'il a perdu quelques millénaire auparavant. Je ne sais pas exactement quand ses congénères et lui ont cessé d'être des fjords. Par contre, j'ai appris qu'il y a 12000 ans environ, alors que le golfe du Saint-Laurent avait enfin réussi à se libérer de la dernière glaciation, ils étaient encore des vallées creusées par les glaciers et que Terre-Neuve n'avait rien à envier au Groenland. En préparant ma ballade, j'ai également appris que les roches qui m'entouraient appartenaient aux Laurentides, cette chaîne de montagne plus haute que l’Himalaya qui traversait le supercontinent Rodinia, il y a un milliard d'années, et dont la majeure partie constitue la rive nord du Saint-Laurent. 

Un 25 juillet au parc provincial de Blow Me Down

Côte ouest de Terre-Neuve, le relief s'est accentué mais d'anciens glaciers se sont arrangés pour arrondir les angles aussi bien des sommets que des vallées à la forme en U si caractéristique de leur passage.


Ici, les plages ne sont pas de sable blanc, mais les plantes qui y vivent ont les mêmes problèmes que sous les tropiques. Ce n'est pas l'eau qui manque, mais elle est salée et donc difficile à absorber; c'est une question de gradient osmotique. Alors, au lieu de dépenser de l'énergie pour l'absorber, il est plus simple de limiter son évaporation en épaississant l'épiderme des feuilles et en le recouvrant d'une cuticule cireuse.   

Caquillier édentulé
Mertensie maritime
Scutellaire toque

Patience pâle