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Patates en chapelets

Il y a quelques années, j'ai introduit, dans le jardin, de l'Apios d'Amérique (Apios americana), une plante indigène en Amérique du Nord. Comme elle grimpe vite et fait de belles fleurs qui sentent bon, j'avais dans l'idée d'en faire un rideau végétal en la laissant monter dans la clôture. Ça marche très bien. Le revers de la médaille est qu'elle est expansive et indomptable, ressortant de terre chaque année un peu n'importe où.

Le secret de son énergie réside dans des chapelets de tubercules qu'elle produit sur de longues racines traçant juste sous la surface du sol. Malheureusement pour elle, sa force est aussi son point faible, car ses tubercules sont comestibles et faciles à extraire; il suffit de tirer sur la tige pour en sortir tout un "rail". Ils sont par ailleurs très nutritifs. Outre l'amidon, plus lentement digestible que celui de la pomme de terre, on y trouve des omégas 6 et 2 à 3 fois plus de protéines que dans la pomme de terre. 

On prépare l'apios qui est de la famille du haricot (celle des Fabacées) comme la pomme de terre qui est d'une autre famille, celle des Solanacées. On lave les tubercules et on les fait bouillir pendant une trentaine de minutes. On peut aussi les faire rôtir au four ou dans une poêle. La texture est celle de la pomme de terre et la saveur se situe entre la patate et la châtaigne, ou la noisette selon d'autres.

Projet en cours

Fallback text

Je fais actuellement une synthèse de la littérature sur les plantes toxiques du Québec en prévision d'un article sur le sujet. Si la question vous intéresse, vous pouvez consulter et naviguer dans mon document de travail ci-dessus ou à l'adresse suivante pour y laisser des commentaires : https://espace-jfn.onlyoffice.com/s/R2QTvzgRGjdHBcR

Le tableau change fréquemment. Je procède pour l'instant par statut de la plante au Québec (indigène, naturalisée, horticole, plante d'intérieur) puis par famille, dans l'ordre alphabétique. Il doit être possible de laisser des commentaires si vous constatez des oublis ou des erreurs, ou si vous avez des interrogations à formuler.

Le projet fait suite à la lecture de plusieurs intervenants sur les réseaux sociaux, qui s'interrogent (dans le meilleur des cas) sur la comestibilité d'une plante ou qui pensent avoir reconnu une plante comestible. Il s'agit d'attirer l'attention de ces cueilleurs sur les dangers que peuvent représenter certaines plantes et les risques que fait courir une erreur d'identification. Par ailleurs, en tant qu'ex-pharmacologue, je garde un intérêt particulier pour les propriétés pharmacologiques et toxicologiques des plantes.

Indigène ou naturalisée ?

Des choses que l'on croyait acquises – je pense à la paix en Europe – ou de la vie que l'on croyait indigène à force de la rencontrer – là, je ne pense pas aux Tremblay, mais plutôt aux trèfles – ne sont en réalité que l'expression planifiée ou accidentelle de nos actes. 

Aucun trèfle n'est indigène au Québec.

Je dis ça parce que je viens de consulter, pour la énième fois, un article formidable paru dans "Le naturaliste canadien" en 2012, dans lequel quatre chercheurs présentent une mise à jour de la liste des espèces vasculaires exotiques naturalisées au Québec. En ce qui me concerne, c'est presque une lecture de chevet que je parcours de temps à autre et qui me réserve toujours une surprise. Par exemple, je viens d'apprendre que l'omniprésent érable à Giguère (Acer negundo) a été introduit au Québec avant 1883, probablement à des fins ornementales, et aussi que le houblon (Humulus lupulus) n'est pas qu'une plante naturalisée. Ainsi, Hunulus lupulus var. lupulus est européen, mais Humulus lupulus var. lupuloïdes est canadien

Il faut souligner le travail considérable qui a été fourni pour dresser cette liste des 899 plantes que l'on croyait d'ici (ici faisant référence au Québec), assortie de leur origine, de la date de la première preuve de leur naturalisation et du motif probable de leur introduction.

L'article en question "Lavoie, C., Saint-Louis, A., Guay, G. & Groeneveld, E. (2012). Les plantes vasculaires exotiques naturalisées : une nouvelle liste pour le Québec. Le Naturaliste canadien, 136(3), 6–32. https://doi.org/10.7202/1009237ar" peut être consulté et téléchargé ici.   

320 millions d'années les séparent

Baie de Fundy vue du cap Enragé

Nouveau-Brunswick, an de grâce 2022, nous avons atteint le Cap Enragé et surplombons la Baie de Fundy qui s'ouvre devant nous vers le sud-ouest et le large. De l'autre côté, c'est la Nouvelle-Écosse.

Pour rejoindre le pied de la falaise, nous suivons la faille que d'autres ont empruntée avant nous, comme en témoigne l'inukshuk à notre droite. La marée est basse et nous en profitons pour examiner les éboulis à la recherche de traces d'une vie passée.

Il y a 320 millions d'années, à l'époque du carbonifère, nous aurions marché sur l'équateur, au cœur de la Pangée, dans l'un de ces vastes bassins marécageux enclavés entre les Appalaches et la chaine hercynienne, plus précisément les Mauritanides. Nous aurions progressé sous le couvert d'une forêt dans laquelle les conifères récemment apparus se disputaient la place avec des fougères géantes et des prêles gigantesques. Peut-être aurions-nous croisé l'un des premiers tétrapodes. 

De cet âge d'or du règne végétal, il ne reste aujourd'hui que du charbon et quelques fragments pétrifiés qui nous racontent leur histoire et alimentent notre imaginaire.

Ci-dessus, des fragments de calamites, un proche parent disparu des prêles que l'on peut voir ci-dessous et qui ont conservé cette tige segmentée si caractéristique. À cette époque, les plantes à fleurs n'existaient pas et la reproduction se faisait principalement par des spores. La graine avait été récemment inventée par les gymnospermes dont font partie les conifères, mais pas le fruit qui la recouvre et qui est une invention des plantes à fleurs. 
Chez les prêles, ce que l'on prend pour des feuilles sont en fait des rameaux. Les véritables feuilles sont ces petites écailles soudées entre elles qui forment un manchon à la base de chaque segment de la tige ou des rameaux. 

Un bain de mousse

Entre deux des racines qui rayonnent du bouleau, je veille jalousement au bien-être d'un tapis de mousse. Rien n'a l'autorisation de s'y établir, ni l'herbe-aux-écus du quadrant voisin, ni l'ambitieuse bugle rampante qui profite du moindre relâchement pour jouer au poutine de jardin.

Bien qu'elle se débrouille très bien toute seule pour étouffer toute tentative de colonisation, je l'aide parfois à faire la police dans l'espoir qu'un jour, elle couvre assez de surface pour pouvoir me rouler dedans.

Un 1er mai à Pointe-Pelée

Savane des flèches de sable du lac Érié

Finalement, il n'a pas plu aujourd'hui et nous en avons profité pour retourner voir les cactus que nous avions trouvés hier. Il s'agit de l'Oponce de l'Est (Opuntia cespitosa), une des cinq espèces de cactacées du Canada; les autres étant dans le centre et l'ouest du pays.

Évidemment, l'Ontario n'est pas le Mexique et si la floraison de l'oponce (à partir de juin) est spectaculaire, la plante n'a de surprenant que son existence dans un pays qui a la réputation d'être froid. Pourtant, à Pointe-Pelée, nous sommes à la même latitude que Barcelone et le nord de la Californie et au plus froid de l'année, en janvier, la température moyenne est -3,4°C. 

Si on ne cherche pas l'oponce, on peut facilement passer à côté sans le voir, ou même le piétiner. On le trouve dans ce que l'on appelle la savane des flèches de sable du lac Érié, un écosystème dont il ne reste plus que deux autres exemplaires au Canada. C'est un milieu sec à sol sableux qui succède à la plage avant de devenir une forêt sèche. On y trouve notamment des graminées, des armoises des champs (Artemisia campestris) des genévriers communs (Juniperus communis) et des genévriers de Virginie (Juniperus virginiana). L'oponce y forme des tapis circulaires de "raquettes" prostrées qui se dressent parfois, mais jamais plus d'un segment ou deux.

L'île de la Visitation végétale

Érable de l'Amour

L'année dernière, j'ai redécouvert le parc nature de l'Île-de-la-Visitation sur la rive nord de Montréal, au bord de la rivière des Prairies disparues. J'ai trouvé qu'il avait bien vieilli et que la végétation exotique n'y était pas étrangère.

Érable de l'Amour toujours
Toit vert de mousse
Herbe à puce
Luzerne
Alliaire officinale et Syndrome de Stockholm
Consoude officinale
Coronille bigarrée
Herbe aux écus: une autre officinale

Si la carotte m'était contée

La carotte cultivée (Daucus carota subsp. sativus) est à la carotte sauvage (Daucus carota subsp. carota) ce que le chien est au loup: le fruit, ou plutôt le légume, de longues années de sélection. Toutefois, contrairement au loup dont nous ne supportons pas la compétition et que nous avons tenté de faire disparaitre, la carotte sauvage, elle, a échappé à notre vindicte et nous a suivi discrètement dans tous nos déplacements, profitant de notre appétit pour sa congénère apprivoisée. Aujourd'hui, elle est présente sur tous les continents, à l'exception bien sûr de l'Antarctique. 

Souvent ignorée, la carotte sauvage est pourtant facile à reconnaître avec ses feuilles découpées et ses ombelles de petites fleurs blanches ponctuées au centre d'une unique fleur pourpre ou rose; ces mêmes ombelles se transformant une fois fanées en corbeilles brunâtres. Cet été, essayez d'en trouver une et quand vous penserez l'avoir trouvée, tirez sur la tige pour déterrer sa racine blanchâtre et sentez-la. Attention cependant à ne pas la confondre avec de la ciguë ou de la cicutaire, deux plantes de la même famille (les apiacées ex-ombellifères) qui lui ressemblent, mais ne vous laisseront aucune chance d'y regoûter.

La famille des apiacées compte environ 3820 espèces réparties dans 466 genres. Elle est présente sur tous les continents, mais est mieux représentée dans les régions tempérées de l'hémisphère nord. Le genre Daucus serait apparu dans les régions tempérées d'Eurasie; la plus grande diversité des espèces se trouvant dans le bassin méditerranéen. Quant à l'espèce Daucus carota, elle serait originaire de l'ouest de l'Asie. 

Comme pour le loup, la domestication de la carotte remonte à loin. Les premières traces archéologiques de son utilisation sont des graines de carotte sauvage trouvées sur des sites de campements vieux de 4500 ans (l'âge du bronze) en Suisse et dans le sud de l'Allemagne. À cette époque, la carotte n'était pas encore cultivée et on utilisait les graines comme épice ou comme médicament. Sa domestication s'est produite plus tard et ailleurs.

Contrairement à ce que l'on pourrait peut-être croire, le processus de sélection des carottes cultivées et d'autres légumes racines n'a pas pour but initial d'améliorer le goût, mais plutôt d'augmenter la productivité et la facilité de culture. Dans le cas de la carotte, cela signifie favoriser les plantes donnant une racine de grande taille sans ramifications latérales et encourager le comportement bisannuel. Le goût (teneur en sucre), la couleur, la forme et la résistance aux facteurs abiotiques sont venus après.
Favoriser le comportement bisannuel (un cycle de vie sur deux ans) de la carotte est important, car c'est au cours de la première année que la plante stocke dans sa racine les nutriments qui serviront à sa floraison l'année suivante. Une fois que la plante a fleuri, sa racine devient fibreuse et immangeable. Or, certaines carottes sauvages, sous les climats chauds, se comportent presque comme des annuelles. Leur floraison est tellement hâtive qu'elles ne développent pas de réserves importantes et ne sont donc pas intéressantes pour la consommation.   

Les premières preuves d'un maraichage de la carotte remontent au Xe siècle de notre ère, dans une région englobant l'Afghanistan, le Pakistan et l'Iran. À l'époque, la racine se déclinait en deux couleurs: pourpre et jaune. À partir du XIe siècle, elle commence son extension vers l'ouest: Turquie, Syrie, Afrique du Nord et Espagne, probablement propagée par les Arables au cours de leur conquête de l'Ouest. La préférence des populations occidentales se porte alors sur la couleur jaune, bien que l'on trouve aussi de la pourpre. Au XIVe siècle, elle atteint la France et l'Angleterre.

Mais la carotte est ambitieuse, elle veut dominer la planète et part à la conquête de l'est un peu plus tard, vers le XIIIe siècle, en commençant par l'Inde, la Chine pour finalement aboutir au Japon, au XVIIe. Autres lieux autres mœurs, dans ces régions, on préfère les pourpres et au XVIIIe, on crée même en Inde et en Chine des variétés franchement rouges. 

Mais revenons en Europe où à partir du XVIe siècle, le nombres de variétés explose: des blanches, des jaunes, des pourpres, des rouges et les premières carottes orange qui vont rapidement devenir populaires et supplanter les autres. D'ailleurs, les "orange" seront les premières à franchir l'Atlantique et à s'installer en Amérique du Nord où elles s'installeront inévitablement avec leurs inséparables congénères sauvages.
Le développement de la phylogénétique a permis d'écarter l'hypothèse selon laquelle la carotte sauvage aurait été introduite en Amérique du Nord au cours des premières migrations humaines en provenance d'Asie, il y a 18000 à 20000 ans. Les analyses génomiques montrent qu'il y a trop de ressemblances entre la carotte sauvage eurasienne et l'américaine pour une séparation aussi lointaine dans le temps. 

La conquête de l'Amérique du Sud, quant à elle, se fera plus tard, au XVIIIe, avec la découverte d'or dans le sud du Brésil qui attirera des émigrants de Hollande, d'Espagne et d'Allemagne transportant dans leurs bagages de quoi se nourrir et notamment la précieuse carotte.

L'apparition des carottes orange et l'engouement qu'elles ont suscité est encore une source d'interrogation et de discussion chez les scientifiques qui ont échafaudé toute sorte d'hypothèses non résolues à ce jour : (1) elles dériveraient directement des carottes sauvages, (2) elles résulteraient de l'hybridation entre une carotte cultivée et une sous-espèce méditerranéenne de carotte sauvage (Daucus carota subsp. maximus), (3) elles seraient le fruit d'une sélection à partir de variétés jaunes et (4) elles seraient issues de l'hybridation entre une variété européenne de carotte cultivée et la carotte sauvage. 

Concernant leur succès, certains pensent que la couleur orange aurait été un indicateur facilitant le travail de sélection ou de conservation des variétés par les maraichers. En effet, introduisez un gène sauvage dans une carotte orange (n'oubliez pas que les sauvages sont partout au bord des champs) et ses descendants seront blancs, faciles à repérer et à écarter. Par contre, le même phénomène chez les jaunes et les pourpres peut facilement passer inaperçu, se traduisant par des nuances de couleur qu'un jardinier, même non daltonien, peut manquer: un jaune moins jaune, un rouge moins rouge, etc. La conséquence serait alors la perpétuation d'une variété non désirée. Attention, cela reste une hypothèse, mais comment résister à une hypothèse aussi séduisante ?   

Généralement, la sélection des plantes par l'agriculture se traduit par un effet d'étranglement ou de goulot génétique; la diversité des gènes des plantes sélectionnées diminuant drastiquement comparée aux sauvages. Sauf chez la carotte cultivée qui continue à faire preuve d'une grande diversié génétique après tant d'années de manipulation. L'être humain aurait-t-il renoncé devant la difficulté à éliminer la sauvagerie de la carotte ou a-t-il compris l'intérêt qu'il y avait à les conserver ?     


Sources:

Simon P. W. (2000). Domestication, Historical Development and Modern Breeding of Carrot. Plant Breeding Reviews. 19.
Simon P. et al. (2019). The Carrot Genome. Compendium of Plant Genomes. Springer Nature Switzerland.
Iorizzo M. et al. (2013). Genetic structure and domestication of carrot (Daucus carota subsp. sativus) (Apiaceae). American Journal of Botany, 100 (5), 930–938.

Un 17 mai aux Étangs Antoine-Charlebois

Rien à dire sinon que nous avons pu constater une fois de plus la beauté du sauvage en compagnie de notre amie Huguette, dont l'oreille est toujours aussi aiguisée aussi bien pour percevoir les chants que pour les identifier. 

Grand Héron
Grand Héron
Prêle des bois
Paruline jaune
Hirondelle bicolore mâle
Hirondelle bicolore femelle
Paruline à croupion jaune
Grive fauve

La Mère des Mille

La "Mother of Thousands" (Bryophyllum daigremontianum syn Kalanchoe daigremontiana), à ne pas confondre avec la "Mother of Millions"(Kalanchoe delagoensis), porte bien son nom. Originaire du sud-ouest de Madagascar et menacée dans dans son propre pays, cette plante succulente de la famille des crassulacées n'en est pas moins une menace pour les écosystèmes des pays tropicaux dans lesquels elle a été introduite. 

Comme je vois sur les réseaux sociaux de plus en plus de photos de plantes sauvages plus ou moins floues assorties de la question: "est-ce que ça se mange ?", je tiens à préciser que "succulente" est à prendre dans son acception de charnue ou grasse, et non de délicieuse; on n'est jamais trop prudent.
Experte dans l'art de la dissémination, chacune des feuilles de cette envahisseuse produit une armée de plantules entièrement équipées de feuilles et de racines, qui se détachent au moindre frôlement. Lorsqu'une plantule trouve un terrain favorable (et il ne lui faut que de la lumière, un peu de substrat et très peu d'eau), elle commence à se développer et à produire de nouvelles armée de clones après quelques mois seulement.